Vue panoramique de Clermont-le-Fort
Les Amis de Clermont‑le‑Fort

La faune pléistocène de l’Infernet

par Gaston Astre

Extrait de : « A la mémoire de J.B. Noulet qui prouva, dès 1851, l’existence de l’homme fossile » Toulouse, Privat, 1958.

Ce fascicule regroupe des articles publiés dans :
Bulletin de la Société méridionale de Spéléologie et de Préhistoire, tome V (1954-1955)
Bulletin de la Société d’Histoire naturelle de Toulouse, tome 93 (1958).

L’auteur a été invité à identifier les fossiles découverts lors des fouilles de 1955-56. Il récapitule les dix espèces reconnues lors des différentes fouilles, celles de Noulet et celles de Méroc et Paloumé.

LA FAUNE PLÉISTOCÈNE DE L’INFERNET

Les dix espèces découvertes lors des diverses campagnes de fouilles sont :
Arvicola (Campagnol terrestre scherman)
Felis speloea (Grand chat ou lion des cavernes)
Rhinoceros tichorinus (Rhinocéros à narines cloisonnées)
Equus caballus fossilis (Cheval fossile)
Rangifer tarandus (Renne)
Megaceros hibernicus (Grand daim des tourbières)
Capra ibex (Bouquetin)
Bison priscus (Bison ou Aurochs)
Bos primigenius (Grand bœuf primitif ou Urus)
Elephas (mammonteus) primigenius (Mammouth, du type normal, dit franco-italien)

Et voici ses conclusions :

PHYSIONOMIE DE LA FAUNE

On peut estimer que l’ensemble des fossiles trouvés à l’Infernet donne bien une idée exacte de la physionomie réelle du gîte, puisque les fouilles successives, échelonnées en diverses étapes sur plus d’un siècle, ont presque toujours fourni les restes des mêmes animaux. L’impression que le paléontologiste en retire est celle d’une faune pleistocène de composition moyenne : beaucoup de ses espèces constituent un fonds banal et de grande extension, Campagnol scherman, Cheval, Grand Daim des tourbières, Bouquetin, Aurochs, Urus. La question de son âge est de même ordre. Remarquons d’abord que, pour fixer une limite d’ancienneté maximum dans le temps, nous n’avons aucun témoin de la faune ancienne du Pleistocène. Au contraire l’ensemble présente les caractères de la faune dite du Pleistocène moyen : c’est le moment où abonde le Grand Chat des cavernes et où le Rhinocéros à narines cloisonnées est fréquent ; c’est l’époque où le Renne, très rare d’ailleurs dans le gisement, semble arriver dans nos régions, car il n’y était pas avant le Würm. Le Mammouth, en sa mutation ancienne (type franco-italien), dispose d’une longue durée pendant le Paléolithique. La fixation d’une limite d’ancienneté minimum confirme la vue précédente. La faune du Pleistocène supérieur ne se trouve pas ici : nous n’avons pas en effet rencontré la mutation récente (type sibérien) du Mammouth (dont l’indice de fréquence laminaire va jusqu’à 12) qui serait caractéristique de la fin du Paléolithique ; et nous n’avons pas davantage l’abondance du Renne, qui l’accompagnerait. Cette faune pleistocène de composition moyenne est donc aussi une faune pleistocène d’âge moyen. Je ne pense pas qu’on puisse fournir une plus grande précision : les restes sont trop peu nombreux pour qu’on établisse des pourcentages d’espèces, qui permettraient une approximatio n dans l’échelle des climats attribués aux diverses époques préhistoriques successives. Acheuléen (à cause de la molaire de Mammouth, d’indice 8), Moustérien (à cause de l’arrivée du Renne), peut-être Castelperronien ou Aurignacien moyen, sont les termes qui conviendraient le mieux : mais il serait hasardeux de les avancer sur les seules données paléontologiques. Des phases se sont succédé : le nombre assez notable de débris laisse penser que des ossements sont restés quelque temps à l’air libre : et le repérage d’ultime détail n’est pas sûr pour les pièces primitivement recueillies. Comme au temps des recherches de Noulet, l’Infernet conserve sa primauté d’être « le plus riche ossuaire dans la formation pleistocène des vallées sous-pyrénéennes »... Sur la liste des gisements de ce pleistocène de coteaux et de plaines, celui qui vient après lui, par ordre d’importance, Bruguières, n’a livré que trois espèces. Quant aux autres gîtes, ils ont à peu près tous le caractère de localités isolées, ayant enfoui des restes d’animaux tombés sur place ou au voisinage, mais sans aucun indice d’accumulation.